La liste des corrompus ne cesse de s’allonger. Elle n’en finit pas. Il y en a sur tous les fronts. Graisser la machine pour enrober l’autoroute Est-Ouest. Se réserver une partie des transactions dans les hydrocarbures.
Faire blanchir un pas de porte pour un logement. By-passer les règles de la douane pour détaxer des conteneurs dans les ports. Faire manger et boire un agent d’administration pour tel ou tel document. Les mots me manquent pour qualifier toute l’interminable liste des manigances qui se font et se défont un peu partout dans le pays.
Rien n’y fait. Tout y passe. On a beau tenter de trouver la solution aux fraudes qui se trament dans les rouages, rien n’est plus à la mesure ni à la hauteur des malversations qui rongent et minent la vie socio-économique de l’Algérie qui traîne en bas de pages des études mondiales sur la corruption. Alors, on fait appel aux Américains pour nous apprendre comment contrecarrer le blanchiment d’argent et les passages privilégiés aux postes de la douane. Besoin d’un document difficile à obtenir par la voie normale car il y a des pré-requis, qu’à cela ne tienne. Faut juste tenter d’appâter l’agent en charge moyennant un gros petit quelque chose sonnant et trébuchant et le tour est joué. La transaction est « légalisée » en une fraction de seconde. C’est drôle. C’est comique parce que cela devient un secret de Polichinelle tant la manœuvre se répète et se multiplie.
Le jeu de cache-cache ou encore le jeu du singe qui n’a rien vu, rien entendu et, bien sûr, rien dit, fait le bonheur de toute une chaîne dans laquelle chacun mange dans la main de l’autre. Et du coup, je pense au fameux verbe manger qui ne se conjugue qu’à deux personnes mais à la proportionnelle. Une secrétaire de direction au moment de l’entrevue de recrutement l’a testée et le résultat fut immédiat. S’adressant à son futur directeur, elle conjugue le verbe manger au présent : vous mangez, vous mangez, vous mangez, je mange. Trois parts contre une. La secrétaire candidate fut engagée sur-le-champ. Elle s’est mariée et le couple eut beaucoup d’enfants. Beaucoup de bouches à nourrir. Fallait se débrouiller.
Le système D qui a tendance à s’implanter, à s’incruster dans les mœurs de ceux qui détiennent la bourse, le pouvoir de contrôler, le pouvoir de vérifier. La gangrène a pris. Faut sortir les grands moyens. Faut amputer. Sans merci. Sans grâce. Sans pitié pour les corrompus. Sans regret aucun pour les corrupteurs. Mais encore faut-il que « nul ne soit au-dessus de la Loi ». Ce n’est qu’à ce prix que l’on réussira à ne pas brader le pays et à préserver les acquis obtenus de haute lutte.
Il faut convenir que la corruption est aussi et surtout le résultat d’une bureaucratie étouffante et suffocante face aux lenteurs administratives. À la fin de la session du printemps de l’APN, le ministre de l’Énergie avait annoncé que de nouvelles structures allaient combler le vide qui a entraîné les récentes malversations. Rien de concret aujourd’hui encore alors que l’été s’achève et que l’automne est sur le point de pointer son nez. Les douanes viennent de se prononcer pour la réforme du système. Qui va réformer quoi ? Quelle sera la durée de la réflexion ? Les travaux du tramway d’Oran ont traîné en long et en large. Les commerçants riverains commencent à perdre patience et surtout des plumes. On veut nommer un « Monsieur Tram ». Finira-t-on par le trouver avant la fin des travaux ? Le métro d’Alger est prêt. Mais pas la sécurité dans les galeries. Et j’en passe. De quoi perdre le nord quand on voit tout le pain qu’il y a sur la planche, du pain qui ne lève même pas encore !
Par A. Nonaame