Le groupe pétrolier britannique BP, premier investisseur étranger en Algérie, a décidé de retarder deux projets gaziers importants. La société a justifié sa décision par les conséquences de l’attaque terroriste d’In Amenas qui a ciblé un de ses sites en janvier dernier.
Elle a également évoqué les conditions d’investissements.Cette annonce de BP constitue un double coup dur pour l’Algérie. Le premier concerne la crédibilité de l’Etat algérien et particulièrement ses forces de sécurité. Même si le groupe ne le dit pas clairement, BP n’est pas convaincu par les mesures prises par les autorités algériennes après l’attaque d’In Amenas pour assurer la sécurité des sites pétroliers et gaziers du pays. En fait, BP souhaiterait avoir accès à plus d’informations à caractère sécuritaire, ce que les Algériens refusent. Le groupe britannique voudrait également voir l’Etat algérien prendre en charge une partie des frais liés aux nouvelles mesures de sécurité. Selon BP, les frais liés à la sécurité ont triplé, pour atteindre 15% des dépenses d’exploitation.
Le second coup dur concerne l’économie algérienne. BP a décidé de retarder ses deux projets gaziers dans un contexte très difficile, marqué par une chute de la production de pétrole et de gaz algériens. Malgré les nombreux démentis du ministre de l’Energie, Youcef Yousfi, la baisse de production et prochainement des revenus est un sérieux problème qui commence à préoccuper les décideurs. L’Algérie n’a pas préparé l’après-pétrole et les dépenses de l’Etat ont explosé ces dernières années. Une baisse des revenus pétroliers et gaziers est à même de menacer la paix sociale.
BP a mis en avant les conditions d’investissements jugées contraignantes. Pourtant, la loi sur les hydrocarbures a été amendée au début de l’année. Mais les amendements ont été jugés trop timides par les acteurs étrangers du secteur, malgré l’introduction de plus de souplesse fiscale.
Quand le principal investisseur étranger se plaint de contraintes et de difficultés, il envoie un signal fort aux autres acteurs du secteur, qui pourraient suivre. Jusqu’à présent, le gouvernement a tenu tête aux investisseurs étrangers, en refusant de céder sur les nouvelles lois. Mais les projets et les dossiers concernaient des secteurs peu stratégiques : immobilier, industrie, tourisme, banques-assurances… Pour la première fois, la menace concerne le seul secteur stratégique pour le pays : les hydrocarbures. Un test décisif pour le pouvoir.
Plusieurs compagnies énergétiques quittent l’Algérie
BP n’est pas le seul groupe énergétique étranger à réduire ses investissements en Algérie. Une source industrielle, citée, ce jeudi 2 mai, par Reuters, rappelle que, le mois dernier, la société américaine Hess Corp a vendu une de ses deux participations en Algérie à l’espagnol Cepsa à cause de trop mauvais rendements.
Le groupe britannique BG est également en train de quitter l’Algérie et rendre sa licence, qui arrive à expiration en septembre, sur le bloc d’Hassi Ba Hamou, à cause de négociations au point mort avec Sonatrach. Et l’une des plus grosses compagnies énergétique américaines – dont le nom n’a pas été dévoilé – qui avait étudié la possibilité d’investir en Algérie, a finalement choisi de développer des projets ailleurs, toujours selon la même source.
De tels départs interviennent après des années de plaintes à propos des conditions d’investissements énergétiques, rappelle Reuters. Ce qui a conduit à une baisse de production en pétrole et en gaz, ces dernières années, en Algérie.
Ces mêmes sources avaient espéré des évolutions lors de la visite à Londres de Youcef Yousfi, en avril dernier. « Malheureusement, ce fut la visite des occasions manquées » entre la délégation algérienne et BP, Shell, ExxonMobil, Hess, OMV et Petroceltic, raconte un des participants. « Je n’attends aucun changement législatif en 2013, alors que toute l’attention est portée sur la campagne présidentielle », reconnaît une source chez Sonatrach, citée par l’agence Reuters.