Le rapport de l’Association algérienne de lutte contre la corruption établit que le cancer de la corruption s’est généralisé à l’ensemble des institutions. “Dès qu’il y a possibilité d’interaction avec le public, tout service, tout contrôle, tout acte administratif, toute sanction sont monnayables et passibles de transactions occultes”, constate l’AACC. La tumeur s’est étendue à l’ensemble du territoire national : “Aucune wilaya, aucune commune n’y échappe”, note l’enquête de la même ONG.
Plus besoin d’enquête, au demeurant, pour percevoir le niveau de propagation du phénomène.
La corruption est à l’origine, en effet, des déviations morales individuelles de responsables et de fonctionnaires. Tous les États en souffrent dans des mesures variées, en fonction du niveau de transparence des affaires publiques et de démocratie. Mais l’Algérie offre, en plus de ces conditions favorables au fléau, la condition politique qui fait que la corruption n’est plus une pathologie, mais une caractéristique du système.
Elle est intégrée dans la pratique de pouvoir. Par exemple, des positions, réputées opportunes à l’enrichissement, sont explicitement réservées à des privilégiés ; une foule de prétendants convoitent expressément ces fonctions à potentiel spéculatif quand elles sont vacantes. Tout se passe comme si certaines positions sont politiquement dédiées à l’enrichissement de ces “élus” du système.
À force de constater que certaines fonctions sont affectées dans une logique de gestion de privilèges directs et indirects, il a été mentalement intégré que la corruption en est un naturel apanage.
À la banalisation de l’affairisme de fonctionnaires, s’ajoute la pédagogie de l’exemple qui, progressivement, diffuse la pratique de corruption des centres hiérarchiques et géographiques vers leurs périphéries. Bien qu’unanimement dénoncée, la corruption est culturellement admise comme procédure d’obtention d’un droit, comme moyen de s’éviter une sanction, d’une part. Et comme complément de ressources, d’autre part. Même si très souvent ce sont les revenus honnêtes qui font figure de complément.
Un fonctionnaire qui fait le choix de se prémunir de la corruption doit accepter une certaine marginalisation sociale par rapport à sa communauté professionnelle de même statut. Il y a comme une pression dans le sens d’une socialisation de l’argent mal acquis. C’est en ce sens que l’AACC soutient que “la corruption n’est plus l’exception, mais la règle”.
C’est probablement par orthodoxie méthodologique que le diagnostic de l’AACC se conclut par ces recommandations de principe : démocratie locale, transparence de la vie politique et administrative. Autant dire un autre système.
Or, les nombreux opportunistes qui vivent de “fuites” de rente, sous forme de détournements, de privilèges légaux ou informels, de passe-droit, de priorités, de corruption, ne veulent pas d’un changement du système. Ils sont nombreux, puissants et prospères. Et solidaires.
Le système est en quelque sorte piégé par sa propre logique : s’il s’assainit, il perd ses soutiens les plus acharnés, ceux qui s’obstinent à le maintenir en l’état, malgré les échecs spectaculaires et renouvelés qu’il enregistre dans tous les domaines.
Mustapha Hammouche
Plus besoin d’enquête, au demeurant, pour percevoir le niveau de propagation du phénomène.
La corruption est à l’origine, en effet, des déviations morales individuelles de responsables et de fonctionnaires. Tous les États en souffrent dans des mesures variées, en fonction du niveau de transparence des affaires publiques et de démocratie. Mais l’Algérie offre, en plus de ces conditions favorables au fléau, la condition politique qui fait que la corruption n’est plus une pathologie, mais une caractéristique du système.
Elle est intégrée dans la pratique de pouvoir. Par exemple, des positions, réputées opportunes à l’enrichissement, sont explicitement réservées à des privilégiés ; une foule de prétendants convoitent expressément ces fonctions à potentiel spéculatif quand elles sont vacantes. Tout se passe comme si certaines positions sont politiquement dédiées à l’enrichissement de ces “élus” du système.
À la banalisation de l’affairisme de fonctionnaires, s’ajoute la pédagogie de l’exemple qui, progressivement, diffuse la pratique de corruption des centres hiérarchiques et géographiques vers leurs périphéries. Bien qu’unanimement dénoncée, la corruption est culturellement admise comme procédure d’obtention d’un droit, comme moyen de s’éviter une sanction, d’une part. Et comme complément de ressources, d’autre part. Même si très souvent ce sont les revenus honnêtes qui font figure de complément.
Un fonctionnaire qui fait le choix de se prémunir de la corruption doit accepter une certaine marginalisation sociale par rapport à sa communauté professionnelle de même statut. Il y a comme une pression dans le sens d’une socialisation de l’argent mal acquis. C’est en ce sens que l’AACC soutient que “la corruption n’est plus l’exception, mais la règle”.
C’est probablement par orthodoxie méthodologique que le diagnostic de l’AACC se conclut par ces recommandations de principe : démocratie locale, transparence de la vie politique et administrative. Autant dire un autre système.
Or, les nombreux opportunistes qui vivent de “fuites” de rente, sous forme de détournements, de privilèges légaux ou informels, de passe-droit, de priorités, de corruption, ne veulent pas d’un changement du système. Ils sont nombreux, puissants et prospères. Et solidaires.
Le système est en quelque sorte piégé par sa propre logique : s’il s’assainit, il perd ses soutiens les plus acharnés, ceux qui s’obstinent à le maintenir en l’état, malgré les échecs spectaculaires et renouvelés qu’il enregistre dans tous les domaines.
Mustapha Hammouche