C´est connu, l’Algérie est d’abord un marché. Peuplée de commerçants et de clients.
La rente, qui n’a jamais été aussi abondante, entretient ce système qui tourne sur lui-même en expulsant du pétrole et en aspirant de la camelote. Pour subsister et tenir son rôle dans le système global, il doit maintenir son espace vital dans un système local d’improductivité presque absolue.
Le résultat en est un complexe rente-bazar définissant le modèle de société qui est le nôtre, un modèle à deux pôles : d’un côté, un pouvoir qui organise la répartition de la rente pétrolière ; de l’autre, un système commercial qui oriente la collecte finale de cette rente.
Comme le discours politique est resté détaché de la logique “systémique” et s’acharne à vouloir exprimer une option de développement économique qui n’existe pas, nous sommes régulièrement surpris par les faits qui nous semblent en contradiction avec l’orientation nationale : nous nous émouvons ainsi d’entendre le directeur général des douanes nous apprendre que “60% des importations sont constituées de produits de contrefaçon” ou de voir des députés rétablir avec une certaine aisance la liberté d’importer la friperie. La douane et l’APN sont en conformité avec leur rôle d’encadrement d’une société rentière bazardée et c’est nous qui confondons le modèle virtuel décrit par le discours officiel avec la réalité.
Pourtant, comme acteurs économiques, nous tenons individuellement notre plein rôle dans ce système : nous avons culturellement perdu le sens de la relation entre notre utilité économique et sociale et notre statut. L’État, de son côté, ignore les critères qui président à la conduite de son activité de distribution des fonctions, des augmentations de salaires, des logements, etc. Il fait comme pour la rente en général : il réagit en fonction des rapports de force. En gros, l’Algérien vit en fonction de sa capacité à contribuer ou à nuire à l’équilibre d’un système politico-social et non en fonction de sa contribution à la production d’une richesse qui, elle, tombe du ciel. Ou, plutôt, surgit du sous-sol. C’est dire la précarité d’une telle situation !
Le dispositif institutionnel est orienté vers cette fonction : comment distribuer la rente et comment déterminer sa destination finale ? Qui en reçoit quelle quantité ? Et qui doit la récupérer au bout du cycle social, qui passe forcément par le circuit commercial ? Le pouvoir répartit la rente, en effet, et le marché la transforme.
Pour cela, l’État tout entier est impliqué dans la supervision de la sphère commerciale, étape décisive de l’allocation finale des ressources nationales. C’est aussi pour cette raison que les observateurs ne cessent de constater que le ministre du Commerce est constamment contredit par le gouvernement qui dispense les grossistes des registres du commerce, de l’usage du chèque, par les députés qui autorisent la friperie, par le ministère de la Santé qui régente souverainement le marché du médicament. Au pouvoir, tous des ministres du Commerce !
Que reste-t-il alors au ministre du Commerce en titre dans un système où l’État tout entier a fini par se transformer en une immense direction multipolaire et désarticulée de gestion du grand bazar ?
M. H.
La rente, qui n’a jamais été aussi abondante, entretient ce système qui tourne sur lui-même en expulsant du pétrole et en aspirant de la camelote. Pour subsister et tenir son rôle dans le système global, il doit maintenir son espace vital dans un système local d’improductivité presque absolue.
Le résultat en est un complexe rente-bazar définissant le modèle de société qui est le nôtre, un modèle à deux pôles : d’un côté, un pouvoir qui organise la répartition de la rente pétrolière ; de l’autre, un système commercial qui oriente la collecte finale de cette rente.
Comme le discours politique est resté détaché de la logique “systémique” et s’acharne à vouloir exprimer une option de développement économique qui n’existe pas, nous sommes régulièrement surpris par les faits qui nous semblent en contradiction avec l’orientation nationale : nous nous émouvons ainsi d’entendre le directeur général des douanes nous apprendre que “60% des importations sont constituées de produits de contrefaçon” ou de voir des députés rétablir avec une certaine aisance la liberté d’importer la friperie. La douane et l’APN sont en conformité avec leur rôle d’encadrement d’une société rentière bazardée et c’est nous qui confondons le modèle virtuel décrit par le discours officiel avec la réalité.
Pourtant, comme acteurs économiques, nous tenons individuellement notre plein rôle dans ce système : nous avons culturellement perdu le sens de la relation entre notre utilité économique et sociale et notre statut. L’État, de son côté, ignore les critères qui président à la conduite de son activité de distribution des fonctions, des augmentations de salaires, des logements, etc. Il fait comme pour la rente en général : il réagit en fonction des rapports de force. En gros, l’Algérien vit en fonction de sa capacité à contribuer ou à nuire à l’équilibre d’un système politico-social et non en fonction de sa contribution à la production d’une richesse qui, elle, tombe du ciel. Ou, plutôt, surgit du sous-sol. C’est dire la précarité d’une telle situation !
Le dispositif institutionnel est orienté vers cette fonction : comment distribuer la rente et comment déterminer sa destination finale ? Qui en reçoit quelle quantité ? Et qui doit la récupérer au bout du cycle social, qui passe forcément par le circuit commercial ? Le pouvoir répartit la rente, en effet, et le marché la transforme.
Pour cela, l’État tout entier est impliqué dans la supervision de la sphère commerciale, étape décisive de l’allocation finale des ressources nationales. C’est aussi pour cette raison que les observateurs ne cessent de constater que le ministre du Commerce est constamment contredit par le gouvernement qui dispense les grossistes des registres du commerce, de l’usage du chèque, par les députés qui autorisent la friperie, par le ministère de la Santé qui régente souverainement le marché du médicament. Au pouvoir, tous des ministres du Commerce !
Que reste-t-il alors au ministre du Commerce en titre dans un système où l’État tout entier a fini par se transformer en une immense direction multipolaire et désarticulée de gestion du grand bazar ?
M. H.