Après avoir travaillé 3 ans en coopération en Algérie en 1970 puis recommencé 40 ans plus tard pour aider ce pays, je rentre écoeuré par un pays où tout reste cassé, où l’on consomme et ne répare pas, où l’on enseigne mais l’on ne sait pas retenir ses diplômés, où servir est une déchéance, où les hôtels sont inexistants ou délabrés (sauf quelques uns que l’on compte sur les doigts de la main) où des femmes sont lynchées à Hassi Messaoud parce qu’elles travaillent et cela sous le regard de la police, où l’intolérance vis-à-vis des non musulmans conduit aujourd’hui des petits restaurants d’Alger à fermer le midi pendant le ramadan…
Et je pourrais en remplir des pages entières sur ce pays que j’aime pour y avoir consacré 7 ans de ma vie professionnelle à aider la “jeune” Algérie à sortir du fossé du colonialisme. Mais l’Algérie n’est plus dans un fossé mais dans une gorge profonde où l’obscurantisme religieux que nous avons connu au moyen âge est toujours en vie, où les distractions sont absentes de la vie quotidienne, où la copie et le piratage sont un sport national pour occuper les jeunes dont la moité sont au chômage.
Un pays, qui aujourd’hui n’a plus de dette, s’enfonce dans la consommation à tout va sans avoir à l’esprit que cela implique d’entretenir et impose la maintenance préventive pour les services essentiels et vitaux de la communauté… Les hôpitaux sont des espaces où les gens s’entassent à faire la queue avant le lever du soleil pour des hypothétiques soins exercés dans un environnement inacceptable sanitairement parlant avec du matériel qui n’est plus en état de fonctionner.
Depuis 1970 on a construit les plus grandes usines à tisser, des conserveries, des centrales électriques qui sont en ruines depuis longtemps voire qui n’ont jamais ouvert et qui montrent toujours leur tas de ferraille dans les banlieues. L’eau, essentielle à la vie, n’est pas accessible à tous, les stations dépuration n’épurent plus rien au point que les plages proches des grandes villes ont devenues dangereuses l’été pour les familles qui cherchent à égayer leur morne vie d’un peu de vacances en bord de mer, les oueds sont remplis de détritus, de bouteilles et sacs en plastique au point de colmater les canaux d’irrigation essentiels aux cultures. Le budget du transport ferroviaire depuis l’indépendance n’a même pas reçu suffisamment d’argent pour entretenir le réseau laissé par la colonisation au point que depuis peu de temps le gouvernement à décider de refaire tout le réseau et développer 5 à 10.000 km de voies mais sans développer correctement l’entretien et la maintenance préventive. Aujourd’hui du matériel ferroviaire flambant neuf roule sur des voies en mauvais état; demain il restera dans les ateliers pour usure prématurée.
Tout cela ce n’est pas le fait des ex-colons mais d’une société algérienne qui n’arrive pas à sortir d’un socialisme de façade où la seule chose qui compte c’est soi ensuite soi et encore soi et un peu la famille.
Alors cette dame de la révolution célébrée par les uns et haïe par les autres ne pense qu’à elle et à sa notoriété qui la place au dessus des autres apparemment pour elle. Connaissant des choses de l’Etat, elle ne peut pas ignorer que les fameuses prises en charge par la Caisse algérienne pour des soins dispensés en France ne font quasiment pas l’objet de remboursements de la Sécurité Sociale française depuis 1960. Alors si son orgueil et la culture de son ego lui permet de se faire soigner en France et par la France tant décriée localement encore aujourd’hui, c’est que le symbole fort qu’elle représentait pour le peuple algérien dans le passé fait partie du passé et qu’elle aussi n’a plus de respect pour ses frères algériens qui furent ses fères “d’armes” il y a longtemps, très longtemps. Au contraire elle semble user de ce symbole national à des fins personnelles et sans aucun respect de la valeur que cela a encore pour d’autres personnes dans son pays, des personnes qui ne demanderont jamais à descendre au George V, car il y des gens biens en Algérie et parmi eux des anciens combattants qui ont de la décence, du respect et de la dignité dans le dénuement de leur vie quotidienne.
S’il y a un dieu pour juger cela, j’espère que son jugement sera sévère
Tristan