« Pourra-t-il exercer ses fonctions ? ». El Watan résume l’interrogation de tous les Algériens après le retour mardi à Alger d’Abdelaziz Bouteflika. Le président algérien (76 ans) qui était hospitalisé à Paris depuis le 27 avril dernier à la suite d’un accident vasculaire cérébrale (AVC), va devoir « poursuivre une période de repos et de rééducation ».
« Le fait qu’il ait embarqué en chaise roulante signifie qu’il n’a toujours pas retrouvé ses fonctions motrices », ajoute pour sa part « le Soir d’Algérie ». De même, poursuit ce quotidien, « l’absence de son, lors de la séquence filmée apparemment au niveau du salon d’honneur de l’aéroport militaire de Boufarik et diffusée par la chaîne de télévision A3 dans son JT de 16 heures (mardi), laisse déduire aussi qu’il ne s’est pas remis de son aphasie ».
Pourtant les tâches du seul ressort de la présidence sont nombreuse, rappelle le journal, comme la signature de la loi de finances, la révision de la constitution « un autre dossier lourd », affirme « la Tribune ».
« Si les institutions algériennes, reconnaît « Le Matin », ont semblé fonctionner normalement durant son séjour à Paris, l’absence du chef de l’Etat est quand même apparue handicapante en raison des pouvoirs étendus qui lui sont conférés par la Constitution ».
Une présence symbolique à la tête de l’Etat algérien
Et « l’incertitude » est totale. Il n’est ainsi pas certain qu’Abdelaziz Bouteflika qui se trouve depuis mardi dans une de ses résidences algéroises, puisse reprendre ses fonctions, souligne El Watan. « Le siège de la présidence de la République continue à être vacant, à huit mois de la prochaine élection présidentielle » comme si la vie politique était toujours bloquée en Algérie. Seule possibilité évoquée par El Watan : « une présence symbolique » pour donner l’apparence que l’Etat fonctionne « dans le respect de la constitution ». Mais il y l’autre grande interrogation. « S’il est admis que Bouteflika ne se représentera pas à un quatrième mandat présidentiel, a-t-il la capacité de tenir jusqu’à la fin de son mandat prévu pour avril 2014 ? », s’interroge encore El Watan.
Un point de vue qui n’est pas totalement partagé par Amine Echikr dans la Tribune. « Le retour du président à Alger met fin à toutes les spéculations et les polémiques », écrit encore ce journal en dénonçant « les appétits des jeunes loups qui ont fait dériver les débats ». La Tribune fait cette comparaison hardie. « Il faut se demander comment Roosevelt a mené et gagné la Seconde Guerre mondiale à partir d’une chaise roulante ». Et la Tribune d’affirmer qu’il n’y aura pas d’élections anticipées. Mais le journal rappelle que le problème des Algériens n’est pas tant de connaître la redistribution du pouvoir au sein de la classe politique que de voir « une meilleure redistribution de la rente et une justice sociale plus ancrée dans la pratique du gouvernement ». La communication, maillon faible du pouvoir algérien
Reste un point d’accord entre tous les médias francophones en Algérie : la communication du gouvernement sur l’état de santé et le retour de leur président. « La communication demeure le maillon faible du pouvoir algérien qui, encore une fois, a laissé la primauté aux agences de presse étrangères et aux médias français (notamment l’AFP, NDLR), pour annoncer le retour du chef de l’Etat Abdelaziz Bouteflika, à Alger », note « la Tribune ». « Tout comme sa maladie entourée d’un black-out total, le secret a été de rigueur également pour son come-back », constate aussi El Watan.
Une discrétion en tout cas qui tranche avec son retour en 2005 après une première hospitalisation et qui avait été « bien orchestré avec un accueil populaire ».
En tout cas une chose est certaine : l’Algérie se prépare bien à l’après Bouteflika, au pouvoir depuis 1999…
Écrit par Jacques HUBERT-RODIER
Editorialiste diplomatique Les Echos
jhubertrodier@lesechos.fr