Il est surprenant de constater que depuis toujours, les politiques, les géographes et les militaires ont cru bon de donner au Maroc des qualificatifs assez originaux. Lors de la seconde guerre mondiale, les américains ont appelé notre pays "le porte-avion Maroc", ce qui avait plu à l'époque aux nationalistes. Certains géographes français utilisent la formule, d'"île" ou de "pont", ce qui ne déplait pas non plus.
Avec les bouleversements actuels dans les pays arabes, les politologues, quant à eux utilisent la formule d'"exception marocaine". Cette expression semble correspondre jusqu'à un certain point, à la réalité.
Si la notion de "porte-avion" fait référence à l'aspect stratégique, la notion géographique d'"île" reste, en théorie, plus difficilement applicable.
Cependant, au Nord, l'Espagne qui se prépare à un futur gouvernement du Partido Popular qui nous sera forcément hostile, à l'Est, une junte agressive avec des relents prussiens et au Sud, un Sahel devenu un foyer terroriste, le Maroc devient véritablement une île.
L'"exception marocaine" dérange ses voisins, mais semble intéresser les monarchies du Golfe. Est-ce là une des raisons pour laquelle, le Conseil de coopération du Golfe a demandé au Maroc d'adhérer à cet ensemble de pays ? L'île marocaine est isolée et par conséquent, facilement "récupérable", devenant ainsi un allié potentiel dans cette région du Golfe assez instable.
Une autre question consiste aussi à se demander si les réformes prévues par le Maroc pour accéder à une véritable démocratie ont pris de court l'ensemble du monde arabe ou bien si elles n'ont eu aucune incidence (positive ou négative). Car, le discours royal du 9 mars introduisant des réformes fondamentales sur la gouvernance démocratique, est subitement apparu comme un modèle innovant, faisant appel à la liberté, à l'égalité et à la dignité. Dès lors, des contradictions sont apparues au sein des "républiques héréditaire" arabes , mais aussi dans les émirats, aux moyens financiers et médiatiques immenses.
Faut-il critiquer le Maroc ou le féliciter ? Tout ces Etats sont restés perplexes. Il faut rappeler que la même situation s'était produite avec l'adoption du Code de la famille marocain, lorsque ce dernier avait rendu une partie de sa dignité à la femme. L'hostilité avait alors été quasi totale dans les pays arabes.
Au début du XXe siècle, les puissances coloniales ont exigé du Maroc des réformes politiques profondes qui ont permis une modernisation du pays en moins de quarante ans, surtout dans la zone française. Le discours royal du 9 mars et ses propositions pour une monarchie parlementaire qui tout en demeurant islamique, se rapprocherait des démocraties occidentales, sont cette fois-ci le fruit d'une souveraineté pleine et entière. Le parti islamique le plus important "Justice et développement", soutient cette démarche.
Lors de sa réunion à la mi-mars, le Conseil de l'Europe a ajouté à la dernière minute un paragraphe, à son communiqué final qui "accueille chaleureusement la décision du Roi du Maroc de créer un comité consultatif de révision de la Constitution limitant les pouvoirs et octroyant au premier ministre et au Parlement une partie de ces pouvoirs après des élections libres et transparentes".
Les protestations de la jeunesse marocaine à partir du 20 février, ont porté essentiellement sur une lutte sans merci contre la corruption, la mauvaise gestion des entreprises publiques et une réforme de la justice qui doit déboucher sur une indépendance réelle. Ce mouvement de la jeunesse marocaine, basé sur le numérique, n'est pas "virtuel" comme certains le suggèrent, mais a paradoxalement tardé quant à la formulation de ses demandes, jusqu'au début de la deuxième semaine de mai. Il a dû faire face à des tentatives d'infiltration, par des minorités agissantes et extrémistes mais aussi à un manque de réactivité des autorités. A part quelques minorités de "gauchistes" et d'islamistes irrédentistes, aucun grand parti, aucun syndicat important n'a remis en cause la monarchie constitutionnelle en construction, la régionalisation avancée, la déconcentration et l'autonomie prévue pour le Sahara.
Oui, à ce niveau, le Maroc est une île au sein d'un monde arabe en ébullition et sans repères précis.
Depuis l'année 2000, il a fallu faire toute la lumière sur la période 1960-1990 et les crimes qui ont été commis, et sans s'arrêter là, en entreprenant des réformes – encore inachevées – concernant la question des droits de l'Homme et la liberté d'expression. Cette dernière ne doit plus faire face à l'application d'un droit pénal qui transformerait les journalistes en propagateurs de rumeurs. Les hommes et les femmes des médias marocains sont devenus des professionnels. Dès lors, il faut qu'ils puissent disposer de garanties suffisantes, pour l'obtention d'informations crédibles, qui permettent aux réformes d'avancer, et d'éviter l'inertie dominante dans les autres pays arabes. La solution se trouve dans la révision du code de la presse.
Mais le Maroc n'est pas une île en ce qui concerne le terrorisme.
Sur le plan international, la réussite de la coopération anti-terroriste fait que seul des individus isolés, ou des groupuscules, commettent ou commettront des attentats que je qualifierais de "propagande individuelle" afin de plaire à Al-Qaïda ou à d'autres organisations. Il s'agira après de tels actes d'obtenir l'admission au sein de cette organisation la "tête haute". Cependant, depuis la mort de Ben Laden, cette stratégie est en train de changer et ne permet plus de "faire carrière" dans ce domaine et de cette manière. Ayman Al-Zawahiri, surtout intéressé par la guerre contre Israël et les Etats-Unis, permettra l'arrivée en force des asiatiques et des égyptiens au sein d'Al-Qaïda, (ces derniers sont assez méprisants à l'égard des maghrébins). Ainsi, nous assistons encore au Maroc, à des comportements et à une phraséologie agressive des mouvements minoritaires, qui se réclament de l'Islam radical.Mais là aussi, le Maroc a une place originale dans la mesure où de petits partis "gauchistes" ont le même discours expurgé des éléments religieux et enrichi par d'autres, à connotation marxiste-léniniste.
Le Maroc est une île lorsqu'il s'agit de défendre ses traditions ancestrales et ses langues régionales, sans complexe, comme quand il s'agit de considérer comme lui appartenant aussi, les traditions des marocains de confession israélite et d'encourager leur retour au pays dans la dignité et le respect.
L'Initiative nationale du développement humain (INDH) essaye de répondre aux attentes des populations en matière de logement et de qualité de vie. Comme au début du XXe siècle se pose à nouveau la question de la modernisation. Le Souverain est en continuel déplacement dans les différentes régions du Maroc, pour lancer des projets d'infrastructures et surtout contrôler leur réalisation.
A l'exemple des véritables îles, les ports permettent l'ouverture sur le Monde. Tanger Med et d'autres ports en gestation permettent, tout en augmentant les échanges avec l'extérieur, d'agglutiner autour d'eux des activités économiques et logistiques diversifiées.
L'Union européenne ne doit pas se contenter seulement de mises en garde, mais il faudrait que le dialogue politique entrepris avec le Maroc fasse du statut avancé obtenu par notre pays, la base d'un développement durable tout en préservant les ressources naturelles. Si l'Union européenne veut une réelle démocratisation, il faudrait aborder surtout le problème social et parler de fonds structurels, bien que les entrepreneurs privés européens et marocains s'impliquent dans le développement local . A cet égard on peut leur rendre hommage.
Le statut imposé d'île, fait que le Maroc doit prendre en mains son propre destin, sans compter sur une puissance extérieure ou intérieure comme l'armée. Cette dernière et la commanderie des croyants, doivent dépendre uniquement du Roi. Dans une île, l'isolement rapproche gouvernants et gouvernés, pour peu qu'une partie des élites qui profitent du système, évitent de se déchirer pour conserver leur pouvoir. Les partis politiques devront jouer leur rôle conformément à l'article 3 de la constitution de 1996. Il ne s'agit pas seulement d'inscrire la séparation des pouvoirs dans la constitution, ces jeunes ne l'ont réclamé que rarement, en revanche ils ont protestés contre la corruption, l'enrichissement indu et le délit d'initié…
Benallal Mohamed, doyen honoraire
Avec les bouleversements actuels dans les pays arabes, les politologues, quant à eux utilisent la formule d'"exception marocaine". Cette expression semble correspondre jusqu'à un certain point, à la réalité.
Si la notion de "porte-avion" fait référence à l'aspect stratégique, la notion géographique d'"île" reste, en théorie, plus difficilement applicable.
Cependant, au Nord, l'Espagne qui se prépare à un futur gouvernement du Partido Popular qui nous sera forcément hostile, à l'Est, une junte agressive avec des relents prussiens et au Sud, un Sahel devenu un foyer terroriste, le Maroc devient véritablement une île.
L'"exception marocaine" dérange ses voisins, mais semble intéresser les monarchies du Golfe. Est-ce là une des raisons pour laquelle, le Conseil de coopération du Golfe a demandé au Maroc d'adhérer à cet ensemble de pays ? L'île marocaine est isolée et par conséquent, facilement "récupérable", devenant ainsi un allié potentiel dans cette région du Golfe assez instable.
Une autre question consiste aussi à se demander si les réformes prévues par le Maroc pour accéder à une véritable démocratie ont pris de court l'ensemble du monde arabe ou bien si elles n'ont eu aucune incidence (positive ou négative). Car, le discours royal du 9 mars introduisant des réformes fondamentales sur la gouvernance démocratique, est subitement apparu comme un modèle innovant, faisant appel à la liberté, à l'égalité et à la dignité. Dès lors, des contradictions sont apparues au sein des "républiques héréditaire" arabes , mais aussi dans les émirats, aux moyens financiers et médiatiques immenses.
Faut-il critiquer le Maroc ou le féliciter ? Tout ces Etats sont restés perplexes. Il faut rappeler que la même situation s'était produite avec l'adoption du Code de la famille marocain, lorsque ce dernier avait rendu une partie de sa dignité à la femme. L'hostilité avait alors été quasi totale dans les pays arabes.
Au début du XXe siècle, les puissances coloniales ont exigé du Maroc des réformes politiques profondes qui ont permis une modernisation du pays en moins de quarante ans, surtout dans la zone française. Le discours royal du 9 mars et ses propositions pour une monarchie parlementaire qui tout en demeurant islamique, se rapprocherait des démocraties occidentales, sont cette fois-ci le fruit d'une souveraineté pleine et entière. Le parti islamique le plus important "Justice et développement", soutient cette démarche.
Lors de sa réunion à la mi-mars, le Conseil de l'Europe a ajouté à la dernière minute un paragraphe, à son communiqué final qui "accueille chaleureusement la décision du Roi du Maroc de créer un comité consultatif de révision de la Constitution limitant les pouvoirs et octroyant au premier ministre et au Parlement une partie de ces pouvoirs après des élections libres et transparentes".
Les protestations de la jeunesse marocaine à partir du 20 février, ont porté essentiellement sur une lutte sans merci contre la corruption, la mauvaise gestion des entreprises publiques et une réforme de la justice qui doit déboucher sur une indépendance réelle. Ce mouvement de la jeunesse marocaine, basé sur le numérique, n'est pas "virtuel" comme certains le suggèrent, mais a paradoxalement tardé quant à la formulation de ses demandes, jusqu'au début de la deuxième semaine de mai. Il a dû faire face à des tentatives d'infiltration, par des minorités agissantes et extrémistes mais aussi à un manque de réactivité des autorités. A part quelques minorités de "gauchistes" et d'islamistes irrédentistes, aucun grand parti, aucun syndicat important n'a remis en cause la monarchie constitutionnelle en construction, la régionalisation avancée, la déconcentration et l'autonomie prévue pour le Sahara.
Oui, à ce niveau, le Maroc est une île au sein d'un monde arabe en ébullition et sans repères précis.
Depuis l'année 2000, il a fallu faire toute la lumière sur la période 1960-1990 et les crimes qui ont été commis, et sans s'arrêter là, en entreprenant des réformes – encore inachevées – concernant la question des droits de l'Homme et la liberté d'expression. Cette dernière ne doit plus faire face à l'application d'un droit pénal qui transformerait les journalistes en propagateurs de rumeurs. Les hommes et les femmes des médias marocains sont devenus des professionnels. Dès lors, il faut qu'ils puissent disposer de garanties suffisantes, pour l'obtention d'informations crédibles, qui permettent aux réformes d'avancer, et d'éviter l'inertie dominante dans les autres pays arabes. La solution se trouve dans la révision du code de la presse.
Mais le Maroc n'est pas une île en ce qui concerne le terrorisme.
Sur le plan international, la réussite de la coopération anti-terroriste fait que seul des individus isolés, ou des groupuscules, commettent ou commettront des attentats que je qualifierais de "propagande individuelle" afin de plaire à Al-Qaïda ou à d'autres organisations. Il s'agira après de tels actes d'obtenir l'admission au sein de cette organisation la "tête haute". Cependant, depuis la mort de Ben Laden, cette stratégie est en train de changer et ne permet plus de "faire carrière" dans ce domaine et de cette manière. Ayman Al-Zawahiri, surtout intéressé par la guerre contre Israël et les Etats-Unis, permettra l'arrivée en force des asiatiques et des égyptiens au sein d'Al-Qaïda, (ces derniers sont assez méprisants à l'égard des maghrébins). Ainsi, nous assistons encore au Maroc, à des comportements et à une phraséologie agressive des mouvements minoritaires, qui se réclament de l'Islam radical.Mais là aussi, le Maroc a une place originale dans la mesure où de petits partis "gauchistes" ont le même discours expurgé des éléments religieux et enrichi par d'autres, à connotation marxiste-léniniste.
Le Maroc est une île lorsqu'il s'agit de défendre ses traditions ancestrales et ses langues régionales, sans complexe, comme quand il s'agit de considérer comme lui appartenant aussi, les traditions des marocains de confession israélite et d'encourager leur retour au pays dans la dignité et le respect.
L'Initiative nationale du développement humain (INDH) essaye de répondre aux attentes des populations en matière de logement et de qualité de vie. Comme au début du XXe siècle se pose à nouveau la question de la modernisation. Le Souverain est en continuel déplacement dans les différentes régions du Maroc, pour lancer des projets d'infrastructures et surtout contrôler leur réalisation.
A l'exemple des véritables îles, les ports permettent l'ouverture sur le Monde. Tanger Med et d'autres ports en gestation permettent, tout en augmentant les échanges avec l'extérieur, d'agglutiner autour d'eux des activités économiques et logistiques diversifiées.
L'Union européenne ne doit pas se contenter seulement de mises en garde, mais il faudrait que le dialogue politique entrepris avec le Maroc fasse du statut avancé obtenu par notre pays, la base d'un développement durable tout en préservant les ressources naturelles. Si l'Union européenne veut une réelle démocratisation, il faudrait aborder surtout le problème social et parler de fonds structurels, bien que les entrepreneurs privés européens et marocains s'impliquent dans le développement local . A cet égard on peut leur rendre hommage.
Le statut imposé d'île, fait que le Maroc doit prendre en mains son propre destin, sans compter sur une puissance extérieure ou intérieure comme l'armée. Cette dernière et la commanderie des croyants, doivent dépendre uniquement du Roi. Dans une île, l'isolement rapproche gouvernants et gouvernés, pour peu qu'une partie des élites qui profitent du système, évitent de se déchirer pour conserver leur pouvoir. Les partis politiques devront jouer leur rôle conformément à l'article 3 de la constitution de 1996. Il ne s'agit pas seulement d'inscrire la séparation des pouvoirs dans la constitution, ces jeunes ne l'ont réclamé que rarement, en revanche ils ont protestés contre la corruption, l'enrichissement indu et le délit d'initié…
Benallal Mohamed, doyen honoraire