Loin donc des acquis sociaux sur lesquels les rapports du CNES produisaient des pages de louanges, l’Instance présidée par Mohamed Seghir Babes reconnaît que la délinquance juvénile est “en hausse” et que la pauvreté est “une réalité” touchant une partie importantes des jeunes citoyens, et cela s’exprime, selon lui, par le spectacle d’enfants vendeurs aux abords des routes ou collecteurs de déchets dans les décharges publiques.
“Bricoler pour s’en sortir est devenue la devise, un sacerdoce pour ces catégories de jeunes qui se trouvent dans l’incapacité de construire des projets et des trajectoires d’insertion réussies (…) et qui “s’installent alors dans un monde de la débrouille”, observe le texte. Pour le Conseil, la précarité sociale et économique, le capital scolaire, “insuffisant” tout comme le dispositif d’encadrement, figurent parmi les multiples facteurs responsables de cette situation.
Le CNES relève, par ailleurs, que d’autres jeunes, “aspirés par une attitude défaitiste et marginale, s’installent dans des logiques d’expectative voire d’autodestruction où le suicide, la hogra et l’immolation par le feu constituent leur ultime recours pour se délivrer de leur mal être profond et de leur désespoir”.
Il cite d’autres formes extrêmes à travers lesquelles les jeunes expriment leurs protestations contre les injustices sociales et leur marginalisation, “source de leur détresse”, et donne l’exemple de la ville d’Annaba où des jeunes “s’étaient lacérées à coups de couteaux pour dénoncer des listes frauduleuses de bénéficiaires de logements, en mai dernier”.
Le CNES signale également une “montée” de la violence, particulièrement en milieu urbain et dans les cités populaires où de “sanglantes bagarres rangées ont souvent lieu comme au sortir des stades à la fin de matchs de football”. Le phénomène des “harragas”, qui reflète lui aussi la détresse des jeunes aspirant à une vie meilleure en tentant de traverser la mer à bord de barques de fortune au péril de leur vie, “touche toutes les catégories juvéniles, les femmes et les hommes”, lit-on dans le texte.
Le problème de la jeunesse algérienne, par son caractère urgent et stratégique, interpelle l’ensemble de la communauté nationale, indique le CNES, qui estime que les approches administratives, aussi motivées et pertinentes soient-elles, ne peuvent apporter que des “solutions temporaires à un problème qui nécessite une véritable mobilisation de la société et de ses différentes composantes”. A le lecture de ce rapport, il faut bien avouer que cela fait longtemps que le CNES ne s’est pas distingué par un ton aussi critique et incisif. Mais est-le signe pour autant d’un véritable changement ? Pas si sûr…
Synthèse Amine Malik