Le mot a été de nouveau lâché par le tout nouveau ministre de l'Energie et des Mines, Youcef Yousfi, dimanche dernier au Québec (Canada), devant les membres de l'association d'affaires Alliance algéro-canadienne : " Nous voulons stopper les dérives qui se sont produites (...) dans la conduite de nos affaires" ! Des "dérives" ! C'est ainsi donc que Yousfi continue de désigner la gestion du secteur de l'énergie en général et de la compagnie nationale des hydrocarbures, Sonatrach en particulier, par son prédécesseur, Chakib Khelil.
Traduit en termes généraux, cela veut dire que le gouvernement - pour des raisons liées à la lutte des clans - ne compte pas enterrer l'affaire Sonatrach qui a éclaté en janvier dernier et qui a coûté son poste à Chakib Khelil. Le DRS (Département du renseignement et de la Sécurité- la sécurité militaire algérienne) et la justice algérienne sont chargés de poursuivre les enquêtes.
Aussi Echourouk annonce-t-il qu'un proche de l'ancien ministre Khelil, Mohamed Rédha Hemche, ex-directeur de cabinet du PDG de Sonatrach, considéré comme le chef d’orchestre de la magouille révélée en janvier 2010 fait l’objet d’un mandat d’arrêt .
Mohamed Rédha Hemche était la courroie entre le clan Bouteflika et le monde du pétrole.
Hemche a été mis en retraite précipitamment et exfiltré d’Algérie dès l’éclatement du scandale. Sa nouvelle résidence : Montreux, en Suisse, où il est pris en charge par la filiale Sonatrach International Holding Corporation filiale (Samco) à Lugano. Officieusement, le ministre de l’Energie aurait voulu mettre son protégé à l’abri des éventuelles retombées des malversations dans lesquelles il aurait trempé à l’époque où il était directeur de cabinet.
L’ancien PDG Mohamed Meziane, dont les deux fils sont en prison, l’a accusé directement de donner des ordres au nom de Chakib Khelil dans le but d’octroyer des dizaines de marchés de gré à gré, en plus de servir d’intermédiaire entre des personnalités, des bureaux d’études, et des sociétés étrangères pour obtenir des projets illégalement.
Par ailleurs, Noureddine Cherouati, le nouveau président directeur général de Sonatrach, aurait déposé plainte contre des anciens responsables de Sonatrach, notamment ceux de la direction générale des ressources humaines et quelques ex responsables de la direction de l’audit interne. Ils sont accusés d’avoir favorisé un américain proche de Khelil, chef du bureau d’études «Bob Prestige», pour des marchés juteux.
Qui s'occupe de quoi ?
Pour traiter le dossier de l'énergie et de Sonatrach, le DRS se réorganise, si on en croit des sources informées. Jusque là, c'était le général Ahmed Kherfi, successeur de Smail Lamari à la tête de la direction du contre-espionnage (DCE), rebaptisée Direction de la Sécurité Intérieure (DSI), qui avait en charge le secteur de l'énergie. Néanmoins, et afin, dit-on, d’éviter le monopole d’un seul service voire d’une seule personne sur le secteur ultrasensible de l’énergie comme ce fut le cas du temps de Smaïn Lamari, le patron du DRS, le général de corps d’armée Mohamed Lamine Mediène, alias «Tewfic», a désigné d’autres officiers et d’autres services pour suivre de près le dossier de l’énergie, et en particulier celui de la Sonatrach. Ainsi, c’est le général major Rachid Lallali, patron de la Direction de la documentation et de la Sécurité extérieure (DDSE), qui s’occupe désormais des actifs de la Sonatrach à l’étranger. Il s’occupe également des sociétés écrans, et du suivi des contacts avec les sociétés étrangères. C’est lui, par exemple, qui est en charge de la supervision des enquêtes en cours sur les avoirs de la Sonatrach à l’étranger. La DDSE peut compter, en effet, sur un important réseau d’agents expérimentés. Habituellement, les agents de la DDSE à l’étranger s’occupaient essentiellement de la surveillance des opposants algériens établis à l’étranger, notamment les islamistes et les activistes berbères, et de la sécurisation des ambassades.
L.M. (Avec Iris)