Ce 10 mai, les Algériens se rendent aux urnes pour élire leurs députés. Les privations qui touchent une grande partie de la population et la peur d’une victoire islamistes sont au cœur de ce scrutin.
Les affiches collées à la va-vite sur les murs d’Alger ont fait sourire les passants et agacé les notables. Des jeunes Algérois ont inventé le « Parti de la patate et du chômage ». Le kilo de tubercule, qui coûte désormais plus d’un euro, est l’un des derniers coups durs encaissés par une population de plus en plus pauvre.
La campagne des législatives, même si elle ne passionne pas les foules, a relégué au second plan le cinquantième anniversaire de l’indépendance. Conscient que le régime est de plus en rejeté, le président de la République a multiplié les appels à la participation aux législatives du 10 mai.
Voici quelques jours, Abdelaziz Bouteflika conjurait ses concitoyens d’aller voter pour défendre « un État fort, capable de défendre le citoyen et de sauvegarder la souveraineté nationale et la cohésion du pays, dans un contexte international prêtant à de multiples interrogations ».
Ces « interrogations » sont liées au « Printemps arabe » qui a bouleversé la Tunisie et le Libye, deux pays frontaliers de l’Algérie. Celle-ci est, jusqu’à présent, parvenue à éviter d’être emportée à son tour par le sirocco de la révolte.
La tourmente sociale souffle pourtant sur le pays. Le 30 avril, dans la ville côtière de Jijel (ex-Djidjelli), un jeune marchand ambulant s’est immolé par le feu. Des agents venaient de détruire son stand. Aussitôt, une émeute a éclaté.
La peur de la guerre civile Ces gestes désespérés se sont multipliés ces dix-huit derniers mois. Mais l’Algérie n’est pas la Tunisie, où le sacrifice d’un petit marchand a fait chuter le régime du président Ben Ali début 2011. Le pouvoir, en place depuis 1962, a une solide expérience du quadrillage, et les forces de l’ordre ont toujours réussi à étouffer dans l’œuf les velléités de ceux qui voulaient lancer un printemps algérien.
Un autre phénomène explique ce « calme » algérien : la peur de voir le pays replonger dans une guerre civile, comme celle qui a fait 200 000 morts dans les années 90.
Les Algériens, prudents, souvent amers, ne croient plus dans leurs élites. Le scrutin qui s’annonce les laisse perplexes.
25 800 candidats répartis en 44 listes se disputeront les suffrages de 21,6 millions d’électeurs.
Le chiffre des formations en lice intrigue plus d’un Algérien. Lors d’un colloque récent, un politologue s’étonnait de cette floraison de partis dans un pays où le pouvoir a toujours verrouillé la carte politique. D’où les soupçons prêtés au président Bouteflika de privilégier l’émiettement pour conserver le pouvoir au Front de libération nationale, le parti historique, et à ses alliés.
Le FLN est de son côté en pleine tourmente. Son secrétaire général a sauvé de justesse son poste voici quelques semaines face à la contestation interne.
Conscients de ce risque, les trois principales listes islamistes, MSP, El-Islah et Ennahda, ont uni leur destinée au sein d’une « Alliance de l’Algérie verte ».
Une « Deuxième République islamiste » Lors d’une conférence de presse qui s’est déroulée le jour des obsèques d’Ahmed Ben Bella, premier président de l’Algérie indépendante, les dirigeants islamistes n’ont pas caché leur ambition d’édifier « la deuxième République algérienne ». Celle-ci sera bâtie sur les « principes islamistes », notamment en matière économique.
La « marée verte » inquiète de nombreux Algériens, qui accusent la mouvance islamiste d’être financée par le Qatar ou la Turquie.
Dans un tel climat de défiance, les autorités algériennes clament haut et fort qu’elles tiennent à garantir la bonne tenue de ces législatives. Des observateurs internationaux sont déjà arrivés en Algérie. Leur rôle est d’autant plus important que tout soupçon de fraude pourrait bien transformer ce scrutin en une épreuve plus dramatique.
le 10/05/2012 à 05:00 par Raymond Couraud
Les affiches collées à la va-vite sur les murs d’Alger ont fait sourire les passants et agacé les notables. Des jeunes Algérois ont inventé le « Parti de la patate et du chômage ». Le kilo de tubercule, qui coûte désormais plus d’un euro, est l’un des derniers coups durs encaissés par une population de plus en plus pauvre.
Voici quelques jours, Abdelaziz Bouteflika conjurait ses concitoyens d’aller voter pour défendre « un État fort, capable de défendre le citoyen et de sauvegarder la souveraineté nationale et la cohésion du pays, dans un contexte international prêtant à de multiples interrogations ».
Ces « interrogations » sont liées au « Printemps arabe » qui a bouleversé la Tunisie et le Libye, deux pays frontaliers de l’Algérie. Celle-ci est, jusqu’à présent, parvenue à éviter d’être emportée à son tour par le sirocco de la révolte.
La tourmente sociale souffle pourtant sur le pays. Le 30 avril, dans la ville côtière de Jijel (ex-Djidjelli), un jeune marchand ambulant s’est immolé par le feu. Des agents venaient de détruire son stand. Aussitôt, une émeute a éclaté.
La peur de la guerre civile Ces gestes désespérés se sont multipliés ces dix-huit derniers mois. Mais l’Algérie n’est pas la Tunisie, où le sacrifice d’un petit marchand a fait chuter le régime du président Ben Ali début 2011. Le pouvoir, en place depuis 1962, a une solide expérience du quadrillage, et les forces de l’ordre ont toujours réussi à étouffer dans l’œuf les velléités de ceux qui voulaient lancer un printemps algérien.
Un autre phénomène explique ce « calme » algérien : la peur de voir le pays replonger dans une guerre civile, comme celle qui a fait 200 000 morts dans les années 90.
Les Algériens, prudents, souvent amers, ne croient plus dans leurs élites. Le scrutin qui s’annonce les laisse perplexes.
25 800 candidats répartis en 44 listes se disputeront les suffrages de 21,6 millions d’électeurs.
Le chiffre des formations en lice intrigue plus d’un Algérien. Lors d’un colloque récent, un politologue s’étonnait de cette floraison de partis dans un pays où le pouvoir a toujours verrouillé la carte politique. D’où les soupçons prêtés au président Bouteflika de privilégier l’émiettement pour conserver le pouvoir au Front de libération nationale, le parti historique, et à ses alliés.
Le FLN est de son côté en pleine tourmente. Son secrétaire général a sauvé de justesse son poste voici quelques semaines face à la contestation interne.
Conscients de ce risque, les trois principales listes islamistes, MSP, El-Islah et Ennahda, ont uni leur destinée au sein d’une « Alliance de l’Algérie verte ».
Une « Deuxième République islamiste » Lors d’une conférence de presse qui s’est déroulée le jour des obsèques d’Ahmed Ben Bella, premier président de l’Algérie indépendante, les dirigeants islamistes n’ont pas caché leur ambition d’édifier « la deuxième République algérienne ». Celle-ci sera bâtie sur les « principes islamistes », notamment en matière économique.
La « marée verte » inquiète de nombreux Algériens, qui accusent la mouvance islamiste d’être financée par le Qatar ou la Turquie.
Dans un tel climat de défiance, les autorités algériennes clament haut et fort qu’elles tiennent à garantir la bonne tenue de ces législatives. Des observateurs internationaux sont déjà arrivés en Algérie. Leur rôle est d’autant plus important que tout soupçon de fraude pourrait bien transformer ce scrutin en une épreuve plus dramatique.
le 10/05/2012 à 05:00 par Raymond Couraud