La tête baissée, une voix à peine audible, très affaibli par la maladie, le président Bouteflika a lu avec difficulté «son» discours à la nation, ce vendredi soir. L’enregistrement a été refait quatre fois, affirme une source informée. Et pour cause, le chef de l’Etat a tout perdu, même sa voix. Fini donc le temps où Bouteflika déclarait: «Je ne veux pas être un trois quarts de Président». Aujourd’hui, il a montré aux Algériens qu’il ne peut même pas être un seizième de président.
Il avait une opportunité d’ouvrir un débat national sur le changement tout en annonçant son retrait, il s’est contenté d’annoncer des réformettes pour gagner du temps, pour lui-même et pour ses parrains du DRS. Alors que les médias audiovisuels sont fermés à toute voix discordante, le champ politique verrouillé, les nouveaux partis interdits au mépris de la loi, le chef de l’Etat parle de la «liberté d'expression», qui serait, selon lui, une réalité que reflètent nos médias de par leur diversité et par l'audace dans le ton qui les caractérise.
Bouteflika est dans une autre planète, celle où il est confiné. Comme les chefs d’Etats déjà déchus, son premier discours est celui du déni de la réalité.
Il est pour le moins amusant d’entendre un Président tirer argument de la presse algérienne – globalement aplatie même si des individualités affirment leur différence – alors qu’il y a quelques années, il qualifiait les journalistes de «pipelettes de bains maures» (Tayabatte al Hamam).
La diversité médiatique est-elle possible quand l’agrément pour la parution d’un journal dépend du bon vouloir du DRS ? Les journalistes algériens savent d’expérience que la multiplicité des titres ne fait pas le pluralisme. Et que même les journaux «riches» sont dans une fragilité absolue et qu’il suffit de quelques coups de téléphone pour les réduire à bouffer leur capital. Il n’est donc pas surprenant que la quasi-totalité de ces journaux se placent en porte-voix du système. Les journalistes, entre eux, font le compte des journaux gérés par le DRS et ceux qui le sont par la police ou la gendarmerie nationale. Ils notent que seule la garde communale n’a pas eu la chance de diriger quelques journaux qui font le pluralisme de façade.
Dans son discours, Bouteflika prétend que «le pluralisme politique dans notre pays est illustré par l'existence d'une trentaine de partis politiques et d'un parlement pluriel». Ah cette magie du chiffre ! Et on est même le seul pays au monde à avoir plus de vingt députés d’extrême gauche ! Cette balourdise ne fait rire personne. Nul n’ignore que depuis l’arrêt du processus électoral en janvier 1992, «les» partis politiques d’opposition sont muselés. Les autres – la majorité écrasante- sont de simples appareils dirigés par les services. Ils sont réduits à la fonction «d’applaudisseurs» des décisions de son «Excellence sa Fakhama M. le président de la République ». Ces partis sont en état végétatifs attendant ce qui vient d’en haut pour l’applaudir et peu importe qu’ils passent d’une chose à son contraire. Faut-il parler du parlement et de l’indignité de la fonction de député leveur de main ?
Pour les droits de l’Homme en Algérie, Bouteflika inverse sans pudeur les rôles pour entretenir la confusion. «Le respect des droits de l'homme doit devenir une préoccupation permanente des différentes ligues et associations nationales chargées de cette question», a déclaré Bouteflika. Quelle plaisanterie ! C’est plutôt à l’Etat, et à sa tête Abdelaziz Bouteflika de respecter les droits de l’homme et de faire de cette mission une préoccupation permanente des différentes institutions de la République. Reconnaître l’existence de ligues de défense des droits de l’homme tout en les empêchant de tenir leurs congrès et organiser leurs activités est un modèle de cynisme.
Au sujet de la révision de la constitution, le Président ne sait pas encore s’il faut soumettre les propositions que lui fera la commission «à laquelle participeront les courants politiques agissants et des experts en droit constitutionnel», à l'approbation du parlement ou aux suffrages par la voie référendaire. Tout cela montre le peu d’intérêt que portent les décideurs aux «réformes» politiques «profondes» et l’absence d’une vision politique claire.
Bouteflika a définitivement raté une opportunité de rentrer dans l’histoire en essayant de faire sortir, en vain, l’Algérie de la géographie du changement en cours dans la région.
Il avait une opportunité d’ouvrir un débat national sur le changement tout en annonçant son retrait, il s’est contenté d’annoncer des réformettes pour gagner du temps, pour lui-même et pour ses parrains du DRS. Alors que les médias audiovisuels sont fermés à toute voix discordante, le champ politique verrouillé, les nouveaux partis interdits au mépris de la loi, le chef de l’Etat parle de la «liberté d'expression», qui serait, selon lui, une réalité que reflètent nos médias de par leur diversité et par l'audace dans le ton qui les caractérise.
Bouteflika est dans une autre planète, celle où il est confiné. Comme les chefs d’Etats déjà déchus, son premier discours est celui du déni de la réalité.
Il est pour le moins amusant d’entendre un Président tirer argument de la presse algérienne – globalement aplatie même si des individualités affirment leur différence – alors qu’il y a quelques années, il qualifiait les journalistes de «pipelettes de bains maures» (Tayabatte al Hamam).
La diversité médiatique est-elle possible quand l’agrément pour la parution d’un journal dépend du bon vouloir du DRS ? Les journalistes algériens savent d’expérience que la multiplicité des titres ne fait pas le pluralisme. Et que même les journaux «riches» sont dans une fragilité absolue et qu’il suffit de quelques coups de téléphone pour les réduire à bouffer leur capital. Il n’est donc pas surprenant que la quasi-totalité de ces journaux se placent en porte-voix du système. Les journalistes, entre eux, font le compte des journaux gérés par le DRS et ceux qui le sont par la police ou la gendarmerie nationale. Ils notent que seule la garde communale n’a pas eu la chance de diriger quelques journaux qui font le pluralisme de façade.
Dans son discours, Bouteflika prétend que «le pluralisme politique dans notre pays est illustré par l'existence d'une trentaine de partis politiques et d'un parlement pluriel». Ah cette magie du chiffre ! Et on est même le seul pays au monde à avoir plus de vingt députés d’extrême gauche ! Cette balourdise ne fait rire personne. Nul n’ignore que depuis l’arrêt du processus électoral en janvier 1992, «les» partis politiques d’opposition sont muselés. Les autres – la majorité écrasante- sont de simples appareils dirigés par les services. Ils sont réduits à la fonction «d’applaudisseurs» des décisions de son «Excellence sa Fakhama M. le président de la République ». Ces partis sont en état végétatifs attendant ce qui vient d’en haut pour l’applaudir et peu importe qu’ils passent d’une chose à son contraire. Faut-il parler du parlement et de l’indignité de la fonction de député leveur de main ?
Pour les droits de l’Homme en Algérie, Bouteflika inverse sans pudeur les rôles pour entretenir la confusion. «Le respect des droits de l'homme doit devenir une préoccupation permanente des différentes ligues et associations nationales chargées de cette question», a déclaré Bouteflika. Quelle plaisanterie ! C’est plutôt à l’Etat, et à sa tête Abdelaziz Bouteflika de respecter les droits de l’homme et de faire de cette mission une préoccupation permanente des différentes institutions de la République. Reconnaître l’existence de ligues de défense des droits de l’homme tout en les empêchant de tenir leurs congrès et organiser leurs activités est un modèle de cynisme.
Au sujet de la révision de la constitution, le Président ne sait pas encore s’il faut soumettre les propositions que lui fera la commission «à laquelle participeront les courants politiques agissants et des experts en droit constitutionnel», à l'approbation du parlement ou aux suffrages par la voie référendaire. Tout cela montre le peu d’intérêt que portent les décideurs aux «réformes» politiques «profondes» et l’absence d’une vision politique claire.
Bouteflika a définitivement raté une opportunité de rentrer dans l’histoire en essayant de faire sortir, en vain, l’Algérie de la géographie du changement en cours dans la région.