Le président de la République a promis la levée de l’état d’urgence “dans un très proche avenir”
Le gouvernement s’est ainsi défait d’une revendication qu’il endure depuis de longues années sans céder sur la principale contrainte qu’elle faisait peser sur les libertés publiques : le droit des Algériens à manifester dans leur capitale.
En démentant, après plusieurs responsables, que l’état d’urgence n’eut jamais “entravé l’activité politique”, le président et le gouvernement rapportent l’interdiction de marcher à Alger, on ne sait pas très bien, au risque terroriste ou au danger de voir se rééditer la marche du 14 juin 2001. Si l’argument est d’ordre sécuritaire, il révèle une bien étrange situation où les manifestations comportent un risque d’attentat mais uniquement à Alger. À moins que ce soit l’attentat qui soit plus tolérable s’il a lieu en dehors de la capitale. Car, il est difficile de croire que des autorités, qui peuvent assurer la sécurité des activités publiques dans les villes de province, aient du mal à en garantir le bon déroulement à Alger.
Il faut bien admettre que si la capitale reste fermée à l’expression publique des citoyens, c’est pour des raisons strictement politiques. D’autant que celle-ci est la seule indiquée pour abriter les manifestations de certaines revendications, celles qui s’adressent au pouvoir central. En vertu de quoi, les Algériens iraient à Oran, Constantine, Sétif ou Chlef pour interpeller leur Président, leur ministre ou leurs députés quand ils estiment devoir le faire ?
Il n’est pas certain que le service d’ordre que nécessite un rassemblement ou une marche corresponde exactement aux moyens qu’exige la sécurisation de la ville contre le terrorisme. D’une part, et à en juger par le déploiement de forces quand il s’agit d’empêcher une activité publique, on peut estimer que l’État a les ressources nécessaires à la sécurisation de la même activité. Et d’autre part, si l’interdiction devait être maintenue, on ne s’expliquerait pas pourquoi des rassemblements qui étaient autorisés en pleine décennie noire devraient être prohibés alors que la situation sécuritaire ne cesse de s’améliorer, nous dit-on, “grâce au succès de la réconciliation nationale”. Pas plus que le danger terroriste, la tournure qu’a prise la marche du 14 juin 2001 — ou la tournure qu’on lui a fait prendre —, ne peut continuer à justifier, dix ans après, qu’Alger reste ville interdite aux activités publiques citoyennes, syndicales et politiques. Le fait qu’une action ait dérapé ne peut constituer un précédent justifiant l’institutionnalisation d’une interdiction. C’est à l’État de prendre les dispositions qui serviront à éviter la réédition de telle dérive au lieu d’infliger — jusqu’à quand ? — une sanction collective à tout un peuple.
Quelle est donc cette vie publique qu’on refoule à la périphérie de la décision politique finalement enfermée dans une espèce de Cité interdite ? Et à quoi sert la levée de l’état d’urgence si la liberté syndicale et politique est bannie loin d’une capitale politiquement sous état de siège ?
Par : Mustapha Hammouche
Le gouvernement s’est ainsi défait d’une revendication qu’il endure depuis de longues années sans céder sur la principale contrainte qu’elle faisait peser sur les libertés publiques : le droit des Algériens à manifester dans leur capitale.
En démentant, après plusieurs responsables, que l’état d’urgence n’eut jamais “entravé l’activité politique”, le président et le gouvernement rapportent l’interdiction de marcher à Alger, on ne sait pas très bien, au risque terroriste ou au danger de voir se rééditer la marche du 14 juin 2001. Si l’argument est d’ordre sécuritaire, il révèle une bien étrange situation où les manifestations comportent un risque d’attentat mais uniquement à Alger. À moins que ce soit l’attentat qui soit plus tolérable s’il a lieu en dehors de la capitale. Car, il est difficile de croire que des autorités, qui peuvent assurer la sécurité des activités publiques dans les villes de province, aient du mal à en garantir le bon déroulement à Alger.
Il faut bien admettre que si la capitale reste fermée à l’expression publique des citoyens, c’est pour des raisons strictement politiques. D’autant que celle-ci est la seule indiquée pour abriter les manifestations de certaines revendications, celles qui s’adressent au pouvoir central. En vertu de quoi, les Algériens iraient à Oran, Constantine, Sétif ou Chlef pour interpeller leur Président, leur ministre ou leurs députés quand ils estiment devoir le faire ?
Il n’est pas certain que le service d’ordre que nécessite un rassemblement ou une marche corresponde exactement aux moyens qu’exige la sécurisation de la ville contre le terrorisme. D’une part, et à en juger par le déploiement de forces quand il s’agit d’empêcher une activité publique, on peut estimer que l’État a les ressources nécessaires à la sécurisation de la même activité. Et d’autre part, si l’interdiction devait être maintenue, on ne s’expliquerait pas pourquoi des rassemblements qui étaient autorisés en pleine décennie noire devraient être prohibés alors que la situation sécuritaire ne cesse de s’améliorer, nous dit-on, “grâce au succès de la réconciliation nationale”. Pas plus que le danger terroriste, la tournure qu’a prise la marche du 14 juin 2001 — ou la tournure qu’on lui a fait prendre —, ne peut continuer à justifier, dix ans après, qu’Alger reste ville interdite aux activités publiques citoyennes, syndicales et politiques. Le fait qu’une action ait dérapé ne peut constituer un précédent justifiant l’institutionnalisation d’une interdiction. C’est à l’État de prendre les dispositions qui serviront à éviter la réédition de telle dérive au lieu d’infliger — jusqu’à quand ? — une sanction collective à tout un peuple.
Quelle est donc cette vie publique qu’on refoule à la périphérie de la décision politique finalement enfermée dans une espèce de Cité interdite ? Et à quoi sert la levée de l’état d’urgence si la liberté syndicale et politique est bannie loin d’une capitale politiquement sous état de siège ?
Par : Mustapha Hammouche