Au cas où certains ne le savaient pas, les grandes manœuvres des présidentielles de 2014 ont déjà commencé. Et même qu'elles ont recommencé, à plusieurs reprises, avec changement de scénario, et d'acteurs.
Parmi les batailles qui ont cours, en ce moment même, pour que se constitue enfin le cercle des Grands Barons qui vont désigner le futur Président, les gros scandales sur la grande corruption, qui ont défrayé la chronique, durant ces dernières semaines, sont un indicateur puissant de ce qui se concocte, des bouleversements qui ont cours, des effets pervers qui ont chamboulé la mécanique.Les habituels et rares décideurs, grands bouffeurs devant l'éternel, qui ont l'habitude de trancher sur tout ce qui a de l'importance dans ce pays, et particulièrement tout ce qui génère la grosse rente mafieuse, sont débordés de tous côtés. Les jeunes loups s'agitent à leurs flancs, la bave aux babines, grognant leur impatience. ils sont sortis du bois à un moment où personne ne les attendait. Tous inconnus, ils sont des dizaines de nouveaux généraux, frais émoulus. Ils occupent des postes importants au DRS, dans le Haut Commandement et au sein des Régions militaires.
Ces jeunes officiers supérieurs aux dents longues ont laissé croire, un certain moment, qu'ils pourraient se découvrir une conscience, et des aspirations à un véritable Etat de Droit, qui ne manquerait pas de demander des comptes sur la grande ripaille qui a eu lieu, et même sur les carnages de populations.
C'est le moyen qu'ils ont trouvé pour signaler leur présence, et leurs ambitions, aux sempiternels gros généraux, et aux dignitaires du clan Boutef qui se sont plantés das le décor.
En vérité, ils se fichent éperdument des idéaux qu'ils brandissent pour la forme, comme ils se contrefichent de qui sera désigné comme futur Chef de l'Etat, que les Algériens devront désigner, zaama zaama, dans une grosse farce électorale. Tout ce qu'ils veulent, ces jeunes fauves, parce qu'ils n'en peuvent plus d'attendre leur tour, est de participer aux discussions, et à la décision finale. Parce qu'ils savent que ceux qui feront partie de ce cénacle de Grands Ducs seront, de jure, les grands bouffeurs de demain, les Parrains titulaires de la mafiocratie qui dirige l'exploitation familiale. Ceux dont la part de butin s'estime en centaines de millions de dollars. Voire en milliards. Les coups de semonce qui sont envoyés par les uns et les autres, et qui sont relayés par une presse empressée, procèdent de cette approche, et des tractations, qui se négocient, pied à pied, pour la moindre brisée.
Personnellement, ce qui m'échappe un peu dans ces habituelles luttes entre mâles dominants, comme dans toute jungle qui se respecte, est l'annonce, quelque peu prématurée, de candidats indépendants à ces élections. J'avoue très humblement que je ne comprends pas très bien la démarche de ces gens, dont l'un est un ancien Chef du Gouvernement, et l'autre un Chef de Parti politique, dont on se saisit pas encore très bien la vision, où les visées.
Sont-ils coupés de la réalité, au point où il ne savent pas qu'il n'est pas question, en la circonstance, de vraies élections ? Où font-ils eux-mêmes partie d'une manœuvre complémentaire, destinée à positionner des éléments d'une stratégie d'appoint? Ont-ils misé sur des gratifications quelconques, qui viendraient les remercier d'avoir participé à un écran de fumée, à donner le change, à habiller le régime de ses habituels trompe-l'oeil démocratiques, qui puissent permettre de négocier certains virages internationaux?
Il ne fait pas de doute que le futur président n'est pas encore désigné. Les tractations sont en cours. Et les scandales qui secouent l'édifice mafiocrate, sans vrai péril sur sa pérennité montrent bien que les négociations, entre les uns et les autres, entre ceux qui pensaient régler la succession, ou la continuité, tous seuls, en deux coups de cuillère à pot, se sont avérées plus compliquées que prévu. Mais il n'y a là rien de vraiment grave. Ils vont trouver un terrain d'entente, et se mettre d'accord sur une recomposition du champ des manœuvres qui puisse permettre une redistribution du butin.
Et quand cela sera fait, quand il se seront entendus sur la suite des événements, ils sauront s'il faudra reconduire l'actuel squatteur d'El Mouradia, ou le remplacer au pied levé, par l'un des poulains, et autres chevaux de retour qui piaffent dans les écuries. Pour le moment, ceux-ci rongent leur frein et se contentent d'attendre la fin des hostilités, entre les uns et les autres décideurs. Ils ne bougent pas une oreille, et se font complètement oublier. A croire qu'ils sont morts. Pas la moindre apparition, ni la moindre déclaration. Ils sont en stand-by. Au garde-à-vous, même quand ils sont en position intime. Ils sont juste là, à espérer que c'est sur eux que la mansuétude et la miséricorde des Dieux de la Poèle vont descendre. Ils n'en dorment plus, et trépignent d'impatience.
Ils savent que c'est le quart-d'heure décisif. Ils savent que lorsque le consensus se fera, les jeux seront faits. Et comme il n'y en aura qu'un, les autres, tous ceux qui connaissent les règles du jeu, n'auront plus qu'à espérer qu'on voudra bien leur confier un rôle quelconque, de lièvre, ou de relais pour la suite des événements.
La question qui me taraude, et que je soumets à l'avis de tous ceux qui voudront bien nous éclairer, est donc celle de ces extra-terrestres, comme Monsieur Benbitour, qui ont déjà annoncé qu'ils seraient candidats. Et je reformule les mêmes questionnements, en espérant des réponses. Sont-ils naïfs ? Est-ce un coup d'estomac, pour s'affirmer coûte que coûte dans une partie où ils n'ont pas de place prévue ? Espèrent-ils des miracles, qui viendraient chambouler toute la savante élaboration ? Où font -ils partie d'une pièce de théâtre un peu tirée par les cheveux ? Autant de vraies questions, sur des candidats atypiques, sur un air de zorna dans un concert de Vivaldi. Tout en sachant que ce n'est pas forcément une mauvaise chose.
Benchenouf Djamaledine