Si au début de son émergence en 1989, la presse était relativement libre en Algérie, l'étau s'est peu à peu resserré sur elle. La mise aux rangs s'est achevée avec l'arrivée de Bouteflika, notamment après la promulgation de la loi pénalisant le délit de presse en 2001.
Tous les moyens ont été utilisés alors, des harcèlements judiciaires avec au bout procès et amandes quand ce n'est pas la prison, aux redressements fiscaux, en passant par les suspensions... A croire que le pouvoir ne l'a permis, que pour le revendiquer par la suite, que pour faire croire à l'existence d'une presse libre donc de la démocratie. En fait, combien de fois de hauts responsables n'ont-ils pas mis en avant le nombre de titres de la presse dite indépendante, comme si la liberté de la presse se mesurait au nombre de journaux. En autorisant la floraison de plusieurs titres le pouvoir a bâti en fait une démocratie de façade. Aujourd'hui le pouvoir ne censure plus, il n'a plus besoin de le faire, les journaux s'autocensurent, ils sont rentrés dans les rangs. C'est tellement vrai qu'il est parait-il question de supprimer la loi sur le délit de presse, pour faire bien vis à vis de l'opinion international. On dira alors qu'en Algérie la presse est libre, la preuve aucune loi ne pénalise.
Côté audiovisuel c'est encore pire. Rien n'a changé depuis 50 ans. La télévision unique règne encore et pour longtemps encore puisque Mihoubi, le secrétaire d'état chargé de la communication a déclaré à plusieurs reprises que l'ouverture des médias lourds n'est pas d'actualité (Le peuple algérien est encore immature selon certains responsables). Le pouvoir n'est pas dérangé par le fait que la majorité des Algériens s'abreuvent des chaines d'autres pays parfois subversives et qui nous font très mal. L’influence des chaines arabophones, islamisantes (souvent un Islam qui nous est étranger) est grandissant, il n’y a qu’à voir leur audimat. Les Algériens perdent alors peu à peu leurs valeurs, leurs repaires pour ne plus savoir qui ils sont. Et bonjour les dégâts. Moins de 10% seulement suivent les programmes de la télévision algérienne.
Dans son dernier message à la presse n'écrivait-il pas, « La presse ne doit pas se complaire dans le rôle d'intermédiaires inerte, ni d'accepter d'être un outil entre les mains de rentiers... ». Mais qui sont donc ces rentiers ? Ne sont-ils pas au sein même du pouvoir? Mais qui a donc confiné la presse dans ce rôle d'intermédiaire entre l'État et le peuple, en la harcelant jusqu'à ce qu'elle oublie, quelle abandonne sa vocation? Dans le même message « Elle ne doit marquer aucune hésitation à combattre les fléaux sociaux, le clientélisme, le régionalisme, la bureaucratie et la corruption ». Bouteflika veut-il que la presse se substitut à l'État, et combien même peut-elle le faire? Tous ces fléaux dont il parle existent au sein même des plus hautes sphères du pouvoir. Il parle de combattre le régionalisme, alors que la majorité des ministres sont de l'ouest algérien, parfois du même village. La corruption est mise à nue et pourtant ceux qui sont censé la combattre et qui ont failli, sont toujours en poste. La presse en a parlé mais cela change quoi? Bouteflika a aussi dans ce même message écrit « Notre pays a opté pour la voie du pluralisme politique et médiatique... » Les Algériens attendent toujours du concret, sinon cela reste seulement une « option ». Les déclarations de bonnes intentions ne manquent pas chez nos décideurs. Bouteflika a fait ces derniers temps bien des éloges de la presse et de son utilité pour l'État et la Nation. Comprenez pour berner le peuple, le maintenir dans un sommeil profond, pour qu'il applaudisse même s'il patauge dans la misère. Et puis peut-on croire cela d'un homme qui a amendé la constitution par l'assemblée national pour rester au pouvoir ? Le fossé entre la parole et l'acte est tellement grand, qu'on serait tenté d’appeler cela « du foutage de gueule ».
Par Mus